La continuité pédagogique à Paris – #RÉCIT N°4 : École Titon (11ème arrondissement)

 

Professeur des écoles à Paris depuis 2010, Léo Lecardonnel enseigne cette année pour des élèves de CE1-CE2 dans le 11ème arrondissement à l’école Titon.

Léo, comment s’est passé la mise en œuvre de votre classe virtuelle ?

Le confinement a été annoncé un jeudi soir. Comme il ne devait débuter que le lundi suivant, mes élèves ont profité du lendemain pour faire leur cartable en conséquence. Ils sont repartis avec les manuels de français et de mathématiques et un plan de travail pour la première semaine.

Le passage à la classe virtuelle s’est opéré dès le mardi suivant. J’avais reçu des informations sur la plateforme du CNED « ma classe à la maison » et l’idée d’envoyer régulièrement des exercices aux parents par courriel, sans échanges ni interactions, ne me convenait pas sur le long terme.

J’ai donc décidé d’instaurer un rendez-vous quotidien en ligne avec mes élèves. Cette option m’a semblé plus intéressante, plus efficace et moins contraignante que celle consistant à envoyer des retours écrits pour chaque exercice. Cette réussite a été rendue possible par le fait que mes élèves pouvaient tous avoir accès à un ordinateur, une tablette ou un téléphone pour se connecter. La mise en place rapide de ce dispositif a été facilitée par l’habitude prise, avant l’annonce du confinement, d’échanger régulièrement avec les parents par la voie numérique pour permettre l’organisation d’un mini-séjour.

Chaque matin, peu avant 10 heures, et parfois dès 9h45, mes premiers élèves se connectent à la plateforme pour discuter avec leurs camarades. Puis, lors d’une séance en 1/2 classe, de 10h à 11 h, je reprends avec eux le travail envoyé la veille. Au moment de la transition, les CE1 « croisent » leurs camarades de CE2 qui auront cours de 11h à 12h. Ils échangent quelques mots avec eux et se disent « à demain ! ». Ces habitudes de travail sont désormais bien acquises par les élèves et leurs permettent de travailler sereinement tout en conservant un lien avec les camarades.

La plateforme offre différents modes de communication : une prise de parole avec le microphone de l’appareil, un « chat » permettant d’échanger des messages écrits et la possibilité d’écrire numériquement sur un tableau blanc ou un document choisi par l’enseignant et partagé avec les utilisateurs. Ces nombreuses options font la richesse d’un enseignement à distance où l’enseignant, à la manière d’un chef d’orchestre et selon les besoins de la séance, fait varier les paramètres :

j’active les micros pour tous lorsqu’il s’agit d’échanger et de se dire bonjour, je limite cet accès et interroge un élève en particulier lorsque je corrige un exercice, j’autorise uniquement l’accès au « chat » pour mener de très courtes dictées… Ces réglages permettent d’éviter le brouhaha mais il s’agit aussi de varier les modalités pour garder l’attention des élèves. Certains sont effectivement tentés, tout comme en classe, de s’intéresser à tout autre chose sur leur ordinateur, en témoignent parfois de longs silences lorsqu’ils sont interrogés.

Généralement, je partage un document qui se retrouve projeté sur les écrans des élèves pour mener une correction, une analyse ou une lecture. Il m’arrive d’aborder une nouvelle notion du programme grâce à cette modalité de travail comme le montre la photographie ci-dessus.

Et alors, convaincu par l’outil ?

La classe virtuelle ne remplacera jamais un enseignement en présentiel du fait notamment de la nécessité, pour ajuster un geste ou analyser une difficulté, d’observer l’élève à la tâche. Cependant, celle-ci m’a certainement poussé à accorder plus d’autonomie à mes élèves. Ils ont développé des compétences sur le plan numérique, notamment pour présenter des exposés, qui leurs seront utiles pour la suite de leur scolarité. L’autre vertu de la classe numérique est de placer l’enseignement au coeur du foyer et donc de mettre les parents au courant des exigences de l’école et au contact du travail réel de leur enfant.

Les pratiques en ligne permettent, dans une situation exceptionnelle de confinement, de garder le lien avec les élèves et de poursuivre notre mission d’enseignant. Pour les enfants issus d’un milieu défavorisé, l’usage du numérique me semble préférable à l’envoi de fiches qui les laissent seuls face à des exercices impersonnels et peu ciblés.


Article proposé en partenariat avec :

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Cette association professionnelle, de statut loi 1901, vise principalement l’établissement entre ses membres de relations fondées sur la pratique de la coopération intellectuelle et de l’entraide professionnelle. Au sein de l’ANCP&AF Paris, les rencontres et formations de formateurs organisées se donnent pour objectif principal de permettre aux formateurs d’acquérir des gestes professionnels performants et innovants pour accompagner efficacement les professeurs des écoles dans leur mission, la réussite de tous les élèves.